mardi 16 avril 2024

                                 Les titres auxquels vous avez échappé :

- Une autrice en prison

- la Christine embastillée (ne cherchez pas, aucune contrepèterie)

- En zonzon, la Kiki 

 Voici finalement, le titre choisi, sobre, politiquement correct (mais moins rigolo)

                                                    Ecrire avec des personnes incarcérées.





    Un beau projet, vraiment, parti du principe que le lien parent-enfant est à maintenir, réinstaurer, et même parfois créer. Les moments de parloir sont stressants et parfois rares, le temps et les circonstances n'encouragent pas les moments de calme, d'échanges paisibles et affectueux. Et quelle place est laissée à la rêverie, la poésie, l'imaginaire, à un autre langage que celui de l'immédiateté ?

Les parents (incarcérés) volontaires ont été sollicités pour écrire et illustrer des histoires, regroupées dans un album à destination de leur (s) enfants(s).

Lorsque nous avons commencé les ateliers, le ton et l’esprit étaient légers, l’ambiance tout en détente. Et puis, il y a eu un moment de bascule, lorsque la question : « Quelle phrase aimeriez-vous dire à votre enfant, quelle phrase auriez-vous aimé entendre, enfant ? » a été posée.

Là, ça devenait un enjeu, ça devenait important, presque grave. Il s’agissait de produire quelque chose de sérieux, de dire quelque chose de vrai et de joyeux à la fois.

Toues ces histoires ont en commun une chose : l’absence. Et toutes évoquent le chemin, le passage affectueux, d’un côté ou de l’autre pour se rejoindre, la transformation nécessaire pour mieux se retrouver.

Les histoires sont belles, douces, puissantes. Les papas et mamans sont fiers. Une professeure qui les accompagne m'a dit qu'un papa lisait le livre au téléphone à son petit, à chaque fois qu'il lui parlait, en rituel. C'est beau, pas vrai ?

Pour moi aussi, ça a été un chemin, un parcours. Je vais devoir m’habituer à l’absence de ces pères, de ces mères, de ces anciens enfants. Et pour moi aussi, ce chemin restera quelque chose de vrai, de grave et de joyeux.

Nous avons été nombreux à travailler sur ce projet : Sandra Poirot-Cheriff, Claude André, de l'association "Jeunes lectures", la compagnie de théâtre Polcatac, les enseignants Pierre-Marie et Elodie, l'association Dédale et d'autres encore, comme Cyrille. On était une chouette équipe, tous, ceux qui pouvaient rentrer chez eux et ceux qui restaient encore.





lundi 15 janvier 2024

Mon catalogue de numéros (bis repetita)


                                    


 Il arrive parfois qu’un maître, une maîtresse, un bibliothécaire ou une documentaliste (changez le genre et le nombre à votre gré) m’invite puis, quelque temps avant la rencontre, m’envoie un petit mot. En général, ça a l’air tout calme, comme demande :

 « Chère Madame qui fait des livres, 
Que pouvez-vous nous suggérer, comme idée d’animation avec un  groupe de 25 petits-moyens (ou CE2, ou collègiens ou autres, barrer les mentions inutiles..) ? 
Cordiales salutations, signé : la personne qui vous a invitée ». 
Message que je peux, puisque je suis moi-même une ex-enseignante, traduire ainsi :

  "MAYDAY, MAYDAY ! Nous sommes en présence de 25 ti-papoutes rhinopharyngités et agités et j’ai trop les  chpettes* que ça vire au jus de boudin. Vous êtes SURE qu’on fera face, surtout vous, Madame l’autrice ? Et puis d'abord, vous savez faire quoi, exactement, comme tour de magie hypnotisante ? Salutations, signé : une personne en charge d'enfants dubitative»

Ce à quoi je réponds : "A pas peur Maîkresse".

J'ai quelques tours dans mon gros sac (lourd, le sac, trop lourd) :

 -         On peut faire une simple rencontre. Les enfants ont lu quelques livres, ils ont préparé quelques questions. Moi, j’ai de mon côté un stock de plus en plus fourni d’anecdotes, de petites saynètes qui rendent le livre proche, vivant, accessible, quotidien. Marianne Barcilon, ma complice, m'a appris à croquer quelques personnages de nos histoires : on peut faire des dessins en direct...





-         On peut suivre le parcours d’un livre, de sa conception depuis le dedans de ma tête jusqu'à sa mise en rayon. J’ai des maquettes, des originaux, des photos…

-         On peut envisager un atelier d’écriture : on part d’un livre (ou pas) et on élabore un texte. Ce travail peut aboutir à la création d’un « vrai » livre que chaque enfant pourra rapporter chez lui et saoûler ses parents, faire bisquer ses frères et sœurs, partager fièrement son travail.



-         Ca peut être une simple lecture, avec ou sans dessins ensuite. Avec des mises en situations, avec des petits sketches, des moments revisités… 




-         Je peux aussi venir simplement m’extasier devant les travaux des petits.  C’est pas pour me vanter mais j’ai une grosse capacité d’extase.



-         On peut mettre en place des activités : par exemple, j’apporte des livres traduits et on essaie de deviner la langue, ou alors on imagine le texte à partir des dessins… Tout est possible. je peux aussi mettre ma casquette de conteuse ou de marionnettiste...






-         Le maître ou la maîtresse a un projet bien élaboré. J’arrive et me coule dedans. C’est pas pour me vanter mais je suis très coulante.







-  Avec des grands, on peut envisager une correspondance, ou une vraie interview, un atelier d'écriture, de poésie, de pièce de théâtre, le tournage d'un reportage, une remise de prix...





-         Je me pointe et je me laisse bisouiller, papouiller, tripoter. Je fais des câlins, je chante des chansons, je mets de la pommade de mon cœur sur les bobos, je fais les photocopies, je bois le café, je fais les dédicaces sur les vieux livres (et même sur les livres des autres auteurs). C’est pas pour me vanter mais je suis très caféinée.







Parce qu’on est bien d’accord : le but, c’est de faire en sorte que la lecture, les livres soient directement associés à la notion de plaisir… Hein oui ?

* « Chpettes » : mot de patois lorrain signifiant littéralement : les foies, la trouillotte, les bouboules, les chocottes, la glaglatte…

dimanche 5 novembre 2023


 La moufle. Il en existe une bonne cinquantaine de versions et toutes ont ceci en commun : le message.

Moi, je n'aime pas cette histoire. Au départ.

Elle est toute simple : c'est l'hiver, il y a un abri. Un animal s'y réfugie. Puis un autre, puis un autre. A la fin, il y a trop de monde, l'abri est détruit.

Le message est simple : il faut savoir dire non.

Bon message.

Le sous-texte, le second message est plus aride : si on accueille tout le monde, on se met en danger. On ne peut pas faire de la place à tous.

Ca me dérange. Petits relents, petites nauséabonderies...

Et si, pour une fois, l'union faisait la force ? Et si, pour une fois, la solidarité était récompensée ? Et si, finalement, on cherchait des solutions, au lieu de se replier frileusement ?

Je suis assez fière d'avoir transformé cette histoire. Et puis, pour une fois, on voit les personnages interagir, à l'intérieur. Il se passe quelque chose entre eux. Une chaleur. Pas seulement physique.

Les illustrations sont vraiment douces et rigolotes et il y a un vrai plus : on peut écouter l'histoire, juste avec un QR code...

Et j'ai casé des prouts. Ca m'a bien fait plaisir.

lundi 25 septembre 2023

Jour de pipi, jour de honte !!!!


 La hooooonte !

Un de mes premiers souvenirs est un souvenir de honte. La maîtresse avait apporté une guitare et elle a  demandé " Qui veut essayer ?"

Moi, j'avais envie d'aller aux toilettes. J'ai levé la main.

- Oui ? Christine, tu veux jouer de la musique ?"

- Je peux aller faire pipi ?

Rire amusé :

- Ah ! C'est ça, ta musique ? 



La honte est un sentiment si fort, une émotion si violente ! Ca méritait bien un livre...Un livre rigolo, pour éloigner les chagrins des petits (qui ne sont pas des petits chagrins).


jeudi 1 juin 2023

Contortionniste

 Le saviez-vous ? Je fais le grand écart ! 




A mon âge ! C'est pas beau ?

Hier, j'étais en Ehpad, atelier d'écriture avec des "pensionnaires". Aujourd'hui, en maternelle.

Grand écart, quoi !

Et vous savez quoi ? Il n'y a guère de différences. Ce sont les mêmes choses qui se dessinent, les mêmes humanités qui émergent, les mêmes thèmes. Le vocabulaire est  différent mais les mots, les émotions finissent par se rejoindre. 

Jouez, vous allez perdre !

- Mon papa m'emmenait sur ses épaules, à son travail. Si j'étais sage, je pouvais faire un trait avec son crayon bleu. A ma mère, il disait "c'est le gamin qui a fait le trait".

-  Quand je suis triste, je voudrais qu'on me prenne dans les bras.

- Moi, je suis folle des arbres. Grimper aux arbres, toujours. Avec les garçons. Faire le cochon pendu, la tête en bas, voir le haut de l'arbre et rester comme ça.

- L'école, je m'applique, je trace, c'est pas beau mais je sais écrire. Je suis fier.

- On a froid aux mains, ça brûle, c'est pas normal, les mains dans l'eau glacée, rouges, ça ne devrait pas brûler. Maman qui me dit "c'est pas grave, donne tes mimines, je te réchauffe".

- Les pique-nique en famille, c'est ça le plus joyeux. Juste de la mayonnaise, du pain, du jambon et une grande couverture pour faire la sieste après. J'adore dormir dehors, l'ombre qui fait le bruit du coucou.

- Il m'a volé ma casquette et quand je l'ai dit à la maîtresse, elle a dit que ce n'était pas grave. Sauf que pour moi, si, c'est grave.

- La montre de mon papa. C'est ça, le plus beau cadeau. Après il est mort, mais pas sa montre.

Grand écart. 

Petit ps : on parle de l'horreur de certains Ehpad. Mais, aussi, et il faut le dire, certains sont vraiment doux, tendres, humains. Ceux qui ont à coeur d'inviter des auteurs acrobates (et autres saltimbanques) ?






jeudi 11 mai 2023

Ce qui se dit, ce qui s'entend...

 Les ateliers d'écriture, avec les enfants, j'adore. Comme on dirait dans Forest Gump, on ne sait jamais sur quoi on peut tomber.

Aujourd'hui, j'ai pu rencontrer celle que, dans mon coeur, j'appellerai Mercredi. Le thème de l'atelier ? "Nina rencontre un extraterrestre".

Mes questions :

- Et où se rencontrent ils ?

Mercredi, 8 ans, sémillante, un pinson :

- Au cimetière !

Un peu plus tard, moi :

- Et que se disent-ils ?

Mercredi, avenante et primesautière : 

- Ils se disent : " Toi, tu vas mourir !"

Dix minutes après,

Moi : Et qu'est-ce que ça pourrait être, cet objet ?

Mercredi, tout sourires :

- Un truc qui crève le ventre...

Je crois que Mercredi pense pas mal à la mort, en ce moment. Ca m'a rappelé une certaine petite Christine au même âge... Mercredi, tape m'en cinq !

L'après midi, je file à la maternelle. Accueil : 

- Ho ! T'es mieux que la dernière fois !

- Regarde, je mets mon nez sur la vitre : ça fait de la colle ! Touche !

On écrit un album. Le thème est "Soirée pyjama".

Moi : Vous croyez qu'ils vont faire des bêtises, les enfants ?

Les petiots ;  

- OUIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII !

Moi, alors, quoi, comme bêtises ?

Aaron, un adorable cheveu sur la langue et de grands yeux candides :

- Ils boivent des verres d'alcool.

Mya, emportée par l'enthousiasme

- du PICON- BIEEEEERE ! (je vous rappelle qu'on est en Lorraine)

Tous les autres :

- Ouiiiii ! Ou d'la KRO !








La maîtresse, regard complice et magnanime, genre "Tu ne savais pas dans quoi tu t'engageais, naïve autrice que tu es !"

Moi :  On avait dit "des petites bêtises"...

Aaron :

- Ben, ils boivent des petits verres d'alcool alors !

N'empêche, on a écrit des belles, chouettes, vivantes, portantes, émouvantes histoires. Comme disait un de mes collègues prof : "On est pas bien payés mais on perd pas son temps "!

mercredi 14 décembre 2022

Comment le sens critique vient aux enfants

 C'est comme ça : il y a des histoires qui font bouger les enfants, qui les font réagir, physiquement j'entends.

Et autrement aussi.

C'est le cas de "L'extraordinaire aventure de la classe de Mademoiselle Petsec".





Je ne résiste pas à l'envie de mettre une photo de ma fille à un apéro-quizz, en vacances




Ca rend joyeux, on est heureux de se défouler.

A la fin, lorsqu'on a bien ri, je demande : " Alors, il a bien fait, d'obéir, cet enfant ?". Et là c'est le débat. Il y a les enfants qui sont bien élevés mais qui sont tout de même perturbés : en effet, le héros, en n'activant pas son sens critique, connaît bien des déboires. Mais il a juste obéi à l'autorité !

Il y a aussi les enfants qui percutent : ben non, quand l'ordre est idiot, il faut refuser.

On arrive donc à parler du consentement comme ça, tranquillement, après une bonne poilade.

Ca peut servir !

                                   Les titres auxquels vous avez échappé : - Une autrice en prison - la Christine embastillée (ne cherchez p...